[La Source 5] Le Välgtland

En préambule, je tiens tout d’abord à me présenter. Je suis, ou plutôt j’étais jusqu’à ma capture, le Frère Nicodème de l’Ordre de Saint-Benoit.
Né en notre bon Duché de Normandie, en l’an de grâce 1040 après le Christ, loué soit son nom, j’ai été ordonné moine en l’an de grâce 1057. J’ai suivi comme soigneur la campagne de Guillaume le Conquérant et suis resté en Est-Anglie par la suite. J’ai été capturé et emmené par une bande de pillards norrois en l’an 1070.
La christianisation de la Scandinavie a beau avoir bien avancée selon les dires, j’ai eu la malchance d’être capturé par d’authentiques païens, indépendants du diocèse et du trône de Norvège.
Peu de temps après ma capture, leur Roi du moment, Ragnar IV, m’a coupé la langue pour que je ne puisse être tenté de convertir aucun d’entre eux.
Néanmoins après la mort de ce Roi ma situation s’est améliorée, j’ai appris à communiquer par signe puis par leur alphabet runique avec un de leur érudits qu’ils nomment «shaman» et ses apprentis.
J’ai pu apprendre d’eux, tout particulièrement leur histoire et par soucis d’humilité, c’est cette histoire que je vais retranscrire ici telle que l’on me l’a présentée.
Puisse le Seigneur me pardonner de coucher sur papier de tels récits païens.


Selon les sagas norroises comptées par les anciens et les shamans, tout aurait commencé en 823.

Après trois années de misère accentuées par trois hivers rigoureux, aux quatre coins de la Scandinavie, des Clans isolés sont attaqués et forcés de prendre la mer. Là ils sont guidés par leurs shamans qui les mènent sur une île inconnue, au nord de l’archipel des Iles Feroe.
Cette île, peuplée de kobolds et de valkyries, serait la porte d’entrée pour la Forteresse d’Ásgarðr, le domaine des Dieux Norrois. Ces quelques centaines d’exilés norrois seraient des élus, amenés là sur volonté divine pour défendre cette entrée et empêcher l’avènement du Ragnarök, la fin du monde.

La Bataille du Fleuve de Feu est titanesque et les oppose aux hommes partisans de Loki le Dieu de la discorde, aux Géants et à d’autres créatures. Après la victoire grâce à l’aide des Shamans, les survivants norrois, valkyries et kobolds se regroupent et se préparent à la prochaine bataille qu’ils savent décisive.
Bran Eriksson, le plus jeune des Jarls norrois, est volontaire pour quitter l’île et faire voile vers la Scandinavie pour ramener des renforts. A la stupeur des autres Jarls, il revient près de deux mois plus tard à la tête d’une immense flotte venant de ce qui est désormais la Suède.
Alors que les préparatifs battent leur plein, l’un des nouveaux arrivants, le puissant Jarl de Guldö (l’Ile d’Or) Jonas Augustinsson, semble vouloir prendre le commandement.
Si les onze autres Jarls sont d’accord sur le fait qu’il leur faille un chef, certains sont plus mesurés quant à qui choisir. Les premiers arrivants, essentiellement natifs des côtes norvégiennes préfèrent le Jarl Fenrir «Fléau-des-Géants» Björnsson qui s’est auréolé de gloire à la Bataille du Fleuve de Feu en tuant plusieurs géants.
Bien que plus jeune que le Jarl Jonas, le Jarl Fenrir a une plus grande expérience du combat et il séduit finalement tous les autres Jarls, sauf les Jarls Jonas et Niklas qui décident de quitter l’île et de repartir chez eux avec la totalité de leurs forces.

Désormais unis derrière le «Haut-Jarl» Fenrir Björnsson, les quelques 3 000 combattants norrois et la cinquantaine de valkyries survivantes livrent finalement bataille au milieu de l’année 825 contre une armée innombrable de sbires du Dieu Loki.
La bataille est féroce et tourne au massacre. Mais un groupe de combattants menés par Fenrir arrive à faire une percée, à tuer le Roi-Shaman Swarn Gudnarsen et à détruire sa corne magique fermant ainsi le passage entre le monde des hommes et celui des Dieux, sauvant ainsi le monde de sa fin.

Suite à la victoire, ne souhaitant pas régner sur ce qu’il considère comme une île n’appartenant pas aux hommes, Fenrir Björnsson cède le titre de Haut-Jarl de l’île à Bran Eriksson. Puis il prend la mer avec ceux qui veulent l’accompagner.
Plus de 400 guerriers, survivants des Clans des Deux Haches, des Ours, du Givre, de la Tempête et de l’Acier, se joignent à lui.
Après une pause en Norvège, la flotte de 18 snekkars arrive en vue de Härnösand, petite ville côtière de Suède et capitale historique du Clan de l’Acier. Grâce au berserker Sigurd Larsson originaire du Clan de l’Acier, la ville et les terres environnantes acceptent l’autorité de Fenrir qui prend le titre de Roi de ce qu’il appelle le Väldmanland, dont Härnösand reste la capitale.

Il prend pour femme celle qui a combattu à ses côtés lors de ce qu’ils appellent désormais «La Guerre Pour les Dieux», Olga Ivásdöttir. Si les deux époux s’entendent bien, ils conservent une vie sexuelle bien libre, bien qu’étrangement aucun bâtard ne naisse de ces aventures.
En revanche en 828, avec Fenrir, Olga tombe enceinte à sa grande surprise, un shaman lui ayant dit qu’elle ne pouvait avoir d’enfant. L’impétueuse guerrière semble alors se calmer et promet même de ne plus faire de raid jusqu’aux 7 ans de son enfant, avant de se rétracter quelques minutes plus tard et de passer à 5 ans, puis 3.
Hélas elle ne survit pas à l’accouchement en donnant naissance à un fils.
Voyant ça, Fenrir aurait déclaré. «Elle a participé à empêcher le Ragnarök, nul n’a jamais pu le vaincre... Jusqu’à maintenant. Notre fils est plus fort qu’elle, plus fort que tout, je le nomme Ragnar !»

Le Roi Fenrir se montre un souverain implacable et cruel envers ses adversaires, mais juste et avisé pour son peuple. Le jeune Royaume du Väldmanland prospère, essentiellement grâce à son commerce avec la Province du Jörmunland dirigée par le Jarl Sven Martinsson et ses Léviathans, d’autres anciens de la Guerre Pour les Dieux.
Mais en 832, un autre ancien de la Guerre Pour les Dieux fait parler de lui. Le «fuyard», le Jarl de Guldö, Jonas Augustinsson souhaite étendre son territoire et se venger de l’affront que lui a infligé Fenrir en lui étant préféré par les autres Jarls lors du vote sur l’île des Dieux.
Le Jarl Jonas Augustinsson attaque d’abord le Jörmunland les sachant alliés avec le Väldmanland. Mais, navigateurs par excellence, les «Léviathans» refusent le combat, laissent leurs villes, se contentant de fuir par la mer, infligeant au passage une cuisante défaite à la flotte de Guldö.
Lorsqu’il arrive à Härnösand avec une armée exténuée, le Jarl Jonas se retrouve face aux forces inférieures en nombre mais fraiches et expérimentées du Väldmanland et du Jörmunland. Sûr de lui malgré tout, il livre bataille et essuie une terrible défaite.

Quelques années plus tard, en 840, Jonas Augustinsson tente à nouveau sa chance en inversant sa stratégie. Son armée contourne le Jörmunland et attaque directement Härnösand. Le résultat est encore pire. Alors que la tentative de siège tourne au désastre pour les assaillants, ces derniers sont attaqués à revers par l’armée du Jarl Sven.
Le Jarl Jonas s’en sort de justesse avec quelques gardes, mais la quasi-totalité de son armée est massacrée. De retour à Björkö, la Capitale de Guldö, le Jarl Jonas trouve la ville assiégée par le Roi du Svealand Anund II Eriksson. Jonas est obligé de jurer allégeance et de donner Gudlaug, sa fille unique au vainqueur.

Après la conclusion d’un pacte de non-agression avec le Svealand, Fenrir relance les raids, principalement sur les côtes baltes.
Alors que les années passent, Fenrir sent que la mort au combat, et donc l’accès au Valhala, lui échappe et que la vieillesse se rapproche. En 859, âgé de 60 ans, il confie les reines du pouvoir à son fils de 31 ans Ragnar qui a déjà assuré la pérennité de la lignée avec trois garçons et une fille. Puis il prend 50 combattants volontaires, tous expérimentés et ayant déjà une descendance mâle, les répartis sur trois navires légers et rapides et traverse la Mer Baltique.
Là il suit ce qui s’appellera plus tard la Route des Varègues, un enchevêtrement de fleuves et de rivières au plus profond des terres des Rus’, menant directement de la Mer Baltique à la Mer Noire. Et de là il rejoint la plus grande cité du monde, Byzance, la Capitale de l’Empire Romain d’Orient.
De nuit, il ravage les faubourgs de la ville semant la mort et la destruction, puis avec sa trentaine d’hommes restants, il escalade les remparts et combat la garnison de la ville. De Fenrir et de ses hommes, aucun ne survit, mais les norrois auront prouvé que 30 des leurs peuvent donner des cauchemars à l’Empereur de Byzance à l’autre bout du monde.

Le règne de Ragnar Fenrirsson semble débuter de la meilleure des manières, ce dernier se montrant aussi bon dirigeant que son père. Mais en 871 il perd son ainé, Björn, lors d’un raid en Ecosse, puis sa femme rendue malade par la perte de son premier né quelques mois plus tard. Par la suite il change, vouant une haine cruelle aux habitants de l’île de Bretagne.
Il prend contact avec le Roi Siegfried III du Danemark et propose de rejoindre la grande armée dano-suédoise ravageant l’Est-Anglie, le Wessex et la Northumbrie.
En 878 la majeure partie de la «Grande Armée Viking» rencontre l’armée du Roi Alfred Ier du Wessex. Bien plus nombreuse, l’armée d’Alfred met en déroute l’armée viking et massacre les fuyards.
Voyant cela, Ragnar et ses hommes, parmi lesquels son plus jeune fils Harald, font demi-tour et meurent tous jusqu’au dernier pour couvrir la retraite de leurs alliés.

Ulf Ragnarsson, le dernier fils vivant de Ragnar est couronné Roi du Väldmanland à l’âge de 28 ans. Resté à Härnösand sur ordre de son père pour diriger le Royaume en son absence, il se montre adroit mais assez hésitant.
C’est cette hésitation qui provoque sa perte.
Deux ans seulement après son couronnement, il apprend que le Jörmunland est attaqué de tous les côtés et appelle à l’aide. Plutôt que d’aider ses alliés «Léviathans» il hésite et le temps qu’il se décide, non seulement le Jörmunland est perdu, mais une grande armée se masse aux portes de Härnösand.
Cette armée est menée par le Roi Erik IV Anundsson du Svealand, le fils du Roi du Svealand Anund II Eriksson et de Gudlaug Jonasdöttir, elle-même fille de l’ennemi de toujours de Fenrir, le Jarl Jonas.
Erik IV est en train d’unifier la Suède et son dernier obstacle à ces yeux est ce petit Royaume rebelle dont sa mère ne cesse de dire du mal.
Le siège tourne court et pendant que la bataille fait rage dans la ville, le fils d’Ulf, Sigurd Ulfsson et sa cousine, Asta Björndöttir, âgés respectivement de 14 et 13 ans seulement utilisent de leur propre initiative un passage dérobé pour quitter la ville en emmenant le plus de gens possible.
Tandis que quelques centaines de personnes, dont très peu de combattants, arrivent ainsi à quitter la ville secrètement, les autres habitants de Härnösand sont massacrés jusqu’au dernier en guise d’exemple.

Commence l’Exode de Sigurd Ulfsson.
Sachant le sud et l’ouest pris et la mer à l’est surveillée, ne reste que le nord. Mais plutôt que de prendre plein nord en longeant la côte à bonne distance, Sigurd prend vers le nord-ouest avec pour objectif de rejoindre la Norvège par les montagnes. Nombre des survivants trouvent l’idée mauvaise et refusent dans un premier temps de le suivre, mais le charisme naturel du jeune Sigurd finit par les convaincre.
Les exilés sont repérés, traqués puis harcelés par une bande d’une quarantaine d’hommes du Clan de la Nuit, inféodés au Roi Erik. Après avoir subi de nombreuses pertes lors d’embuscades, Sigurd a une idée.
Il cache ce qui peut lui servir comme combattants et se place avec eux en retrait tandis qu’Asta mène la colonne principale. Le piège fonctionne et lorsque les hommes du Clan de la Nuit fondent sur la Colonne de vieillards et d’enfants pour les achever, ils sont pris à revers par Sigurd qui prend soin de ne laisser aucun survivant.

Dans les mois qui suivent, au plus fort de l’hiver, la colonne souffre du froid, du manque de nourriture et des attaques de sauvages lapons tout juste sortis de la préhistoire.
Néanmoins malgré les épreuves, les quelques 200 survivants parviennent en vue de la mer. Ils longent la côte norvégienne jusqu’à trouver une ville.
Là, Sigurd est emmené et présenté au Jarl de Hlaðir Håkon Grjotgardsson et au Roi de Norvège Harald Ier Hårfagr. Ces derniers, croyants et respectueux envers l’histoire de Sigurd et de ses ancêtres, lui confient des terres pour s’établir avec ses survivants dans le nord de la Province de Hlaðir, à Bodø ou Sigurd sera proclamé Jarl. Seule condition, jurer allégeance au Jarls de Hlaðir et aux Rois de Norvège, chose que Sigurd accepte volontiers.

Pendant plus d’un siècle, Bodø et ses environs vont vivre dans la paix.
Sigurd et Asta vont s’unir et être heureux en amour... Moins pour ce qui est d’avoir une descendance viable, quatre de leurs six enfants étant morts-nés ou mourant en bas-âge. Mais l’un des deux fils restant est suffisamment fort pour régner.
C’est ainsi qu’à la mort de Sigurd Ulfsson en 908, c’est son fils Ulfenrir Sigurdsson qui est intronisé Jarl.
Après lui, c’est son fils unique Branfred Ulfenrirsson et son neveu Thorsten Thorvaldsson qui vont hériter conjointement du titre de Jarl conformément aux règles de succession norroises.
A la mort paisible sans héritier encore en vie de Thorsten, c’est le fils de Branfred, Ulfenrir II Branfredsson qui est nommé seul Jarl de Bodø.
Son règne est également sans histoire, comme ses prédécesseurs il se contente de lancer quelques raids en Ecosse, en Irlande ou en Est-Anglie, tout en faisant prospérer Bodø pour le compte des Jarls de Hlaðir et des Rois de Norvège.

Mais tout bascule quelques années plus tard.
En 970, le Roi de Norvège Harald II Gráfeldr, impopulaire par sa volonté de christianiser le pays et pour avoir fait assassiner le Jarl de Hlaðir Sigurd Håkonsson est renversé par le fils de ce dernier, Håkon Sigurdsson. Aussi bien vassal de Harald que de Håkon, Ulfenrir n’a le temps de choisir aucun camp à son grand soulagement même si son coeur balance plus pour Håkon qui vénère les «Vrais Dieux».
A la mort d’Ulfenrir II en 986, le titre de Jarl est partagé aux trois héritiers males. Ragnar II, Thorsten II et Sigurd II Ulfenrirsson. Chose qui ne pose aucun problème, en effet les trois frères s’entendent bien et gouvernent tous les trois de manière admirable comme leurs prédécesseurs.
Ce qui pose problème c’est la guerre civile et religieuse qui, à partir de l’an 995, va secouer la Norvège pendant pas moins de 35 ans.
Pendant ces 35 années, les Jarls de Bodø conservent le même alignement, restant fidèles aux Jarls de Hlaðir contre les Rois chrétiens de Norvège Olav Ier et Olav II.
Cette guerre, très meurtrière, ne va pas épargner les Jarls de Bodø.

Sigurd II meurt en 995 en sauvant le Jarl Håkon Sigurdsson lors d’une révolte populaire organisée par des agitateurs à la solde d’Olav Ier.
Thorsten II, son beau-frère Halfdan Fredbjörnsson et le fils de celui-ci Vegard Halfdansson trouvent la mort en l’an mil à la Bataille navale de Svolder contre la flotte du Roi Olav Ier.
Ragnar II, son fils Ulfenrir et la femme de ce dernier Frida meurent à leur tour à la Bataille navale de Nesjar en 1015.

En 1015, le titre de Jarl est partagé entre Ragnar III et Thorbjörn Ulfenrirsson, leur oncle Gunnbjörn Ragnarsson et leur oncle éloigné, Björn Sigurdsson.
Pour la première fois, le nombre de Jarls pour diriger un si petit territoire pose problème. Ragnar, Thorbjörn et Gunnbjörn sont favorables à la poursuite des combats au côté des Jarls de Hlaðir, tandis que Björn se montre plus mesuré et est partisan d’un arrêt des combats.
Méfiants, les trois Co-Jarls favorables au combat ne souhaitent pas laisser la ville à Björn. Aussi à chaque bataille, l’un d’entre eux reste à Bodø. Outré par ce manque de confiance, Björn s’établit dans un petit village en limite de Bodø.
Thorbjörn meurt en 1026 dans une embuscade tendue par des troupes loyales au Roi Olav II de Norvège.
Il est vengé avec la manière par son oncle Gunnbjörn quatre ans plus tard. En effet ce dernier tue en combat singulier le Roi Olav II à la Bataille de Stiklestad en l’an 1030 avant d’être tué à son tour par la garde royale.

Ragnar, qui était présent également à la bataille rentre à Bodø fort d’une immense notoriété. Par la suite il fait preuve d’un profond mépris public et régulier vis à vis de son autre oncle, Björn, qu’il surnomme «le patient», «le prudent», puis «le couard».
Björn ne dit rien, confirmant ainsi sa réputation, au grand désespoir de ses deux fils, Thorvald et Berulf.
C’est surtout Thorvald qui va se montrer le plus virulent. Après le décès de son père en 1041 et contre l’avis de sa femme Bergthora, il ne va cesser de monter ses trois fils contre «l’autre branche de la famille».
En 1049, pour contrer l’image «molle» de leur père, Thorvald et Berulf se joignent au nouveau Roi de Norvège Harald III Harðráði Sigurdsson dans sa guerre contre Sven II Estridsen du Danemark. Ils trouvent tous les deux la mort en 1050 lors de la prise de Hedeby.
Ils sont suivis dans la tombe quelques années plus tard par Ragnar III qui meurt paisiblement après un festin trop arrosé en 1057.

A la mort de Ragnar III, il y a six prétendants légitimes au titre de Jarl.
Ses deux fils bien sûr, Ulfenrir et Olav Ragnarsson. Son cousin Jörund Gunnbjörnsson. Et les trois petis-fils de son oncle éloigné, Thorfinn, Sigurd et Gunnvald Thorvaldsson.
Jörund, ulfhednar émérite, qui a quitté Bodø en 1031, rejoint Novgorod, fait la connaissance de celui qui allait devenir le Roi de Norvège Harald III et suivit ce dernier comme son ombre devenant l’un de ses gardes du corps, se désiste et refuse le titre de Jarl.
Ulfenrir et Olav se soutiennent mutuellement mais refusent catégoriquement que Thorfinn, Sigurd et Gunnvald soient Co-Jarls avec eux.
Pour expliquer ce refus leurs raisons sont multiples. L’ascendant direct de Thorfinn, Sigurd et Gunnvald, Thorvald Björnsson, n’a jamais eu un tel titre, ce qui annule leur droit audit titre. De plus, leur ascendant plus ancien, le Co-Jarl Björn Sigurdsson s’est illustré pour sa lâcheté et a en outre quitté Bodø pour s’établir en périphérie de la ville. En parallèle des accusations de bâtardise et de conversion au christianisme fusent de part et d’autre.
Avant que la crise ne dégénère, Jörund se propose comme arbitre neutre. Après mûre réflexion il prend le parti d’Ulfenrir et Olav. Les trois autres semblent prêts à se rebeller mais sur le conseil de leur mère Bergthora, ils finissent par rentrer dans le rang.

Du moins jusqu’à la mort de celle-ci, fin 1061.
Début 1062, Thorfinn, Sigurd et Gunnvald Thorvaldsson entrent en rébellion ouverte contre Ulfenrir III et Olav Ragnarsson. Le combat est bref mais sanglant.
Olav est le premier à mourir, ce qui met son grand frère dans une rage folle. Nul n’arrête plus Ulfenrir. Non seulement Thorfinn, Sigurd et Gunnvald sont tués et leurs partisans massacrés jusqu’au dernier, mais leurs familles également.
La seule qui est épargnée est la fille unique de Thorfinn, Asta, belle vierge âgée de 17 ans, qu’Ulfenrir compte marier à son fils unique, Ragnar.
Le mariage est célébré peu après.
Bien qu’ayant perdu toute sa famille et ses amis proches, la jeune Asta Thorfinsdöttir se montre très fière lors de la cérémonie, ce que le peuple de Bodø voit comme la fin des hostilités et une véritable unification.

En l’an 1066, le Jarl Ulfenrir III Ragnarsson suit l’exemple de son oncle Jörund Gunnbjörnsson et intègre la grande armée du Roi de Norvège Harald III Harðráði Sigurdsson.
La cible de cette armée, est l’Angleterre. Rejoints sur place après l’accostage par plus de 2 000 écossais, l’armée est forte de près de 15 000 hommes.
Ils enchainent plusieurs batailles et plusieurs victoires, prenant même York, comme la grande armée des légendaires fils de Ragnar Lodbrok plus de deux siècles plus tôt.
Mais ces victoires sont couteuses en hommes et les éloignent des côtes. Harald laisse un tiers de ses forces restantes pour garder les ports et autres zones d’ancrage, ainsi que les villes prises.
Très vite, il lui reste moins de la moitié de son immense armée. Il est rejoint par surprise à Stamford Bridge par l’armée de Harold Godwinson qui compte à peu près autant d’hommes. Sachant qu’il devra faire convertir toute son armée au christianisme le cas échéant, il ignore l’avis de certains conseillers lui intimant de se rendre et livre bataille.
Ivres pour la plupart, moins bien équipés, pris par surprise, les vikings sont défaits et Ulfenrir et Jörund trouvent la mort au côté du Roi Harald.

Lorsque le nouveau Jarl de Bodø, Ragnar IV Ulfenrirsson apprend le carnage il se met à accuser la Norvège d’avoir trahit ses Dieux en accueillant des prêtres et d’en payer les conséquences.
Il rentre tout d’abord dans le rang lors du double couronnement de Magnus II et Olav III de Norvège, attendant de voir l’attitude des deux souverains. Il respecte vite Magnus qui, tout comme lui a dû rester en arrière et laisser les autres faire la guerre, vénère ou tout du moins respecte toujours le Panthéon norrois et qui gère le nord de la Norvège ou se trouve Bodø.
Hélas, malade, Magnus meurt deux ans plus tard en 1069.
Les rapports sont bien moins cordiaux avec son frère, Olav III, qui après la mort de Magnus devient le Roi de Norvège. En effet, Olav a conclu un pacte de non-agression avec l’Angleterre et bien que la conquête de cette dernière par les normands semble annuler un tel pacte, Olav semble vouloir le maintenir.
En outre, Olav semble penser à l’inverse de Ragnar. Il impute la défaite de Stamford Bridge au manque de foi chrétienne. Très vite les monastères et les églises se mettent à fleurir partout en Norvège.

Entre 1069 et 1070 Ragnar IV refuse l’arrivée de prêtres et de moines à Bodø, et ce alors que ces derniers sont envoyés avec la bénédiction du Roi Olav III. En parallèle, Ragnar paie de moins en moins tribut au Roi.
Lorsqu’en 1070 une procession ecclésiastique sous forte escorte royale arrive à Bodø pour réclamer la conversion de la ville au christianisme et le paiement des tributs dus, Ragnar entre en rébellion ouverte et massacre tous les membres de la procession en question.
Jusqu’à présent conciliant à outrance afin d’éviter tout conflit, le Roi de Norvège Olav III ne peut laisser ceci impuni.
Une forte armée se dirige vers le nord afin de mater la rébellion. Mais tout ce qu’ils trouvent à Bodø est une ville déserte et en cendres.
Après avoir fouillé la région sur plusieurs dizaines de kilomètres, nombre d’hommes du Roi parlent de Justice Divine ou de Courroux Divin.

La réalité est toute autre.
Sachant qu’il ne pourrait vaincre l’armée du Roi Olav III, Ragnar s’est contenté de suivre l’exemple de son aïeul, Sigurd Ulfsson, prenant la fuite là ou l’ennemi ne l’attend pas pour s’y établir.
C’est ainsi que Ragnar IV Ulfenrirsson fonde le Royaume du Välgtland à l’extrême-nord de la Norvège, dans des terres désertes et non peuplées, si ce n’est par quelques tribus lapones, très vite soumises ou massacrées.
Pendant quelques années, le Roi Ragnar organise son Royaume et sa capitale, Hämmárfest. Il prend garde à ce que l’existence de son Royaume reste caché, ne laissant personne le quitter excepté ses plus fidèles servants.
Il lance également des raids au nord-est des îles britanniques afin de ramener richesses et esclaves.

La femme de Ragnar, la Reine Asta Thorfinsdöttir, la descendante malheureuse de la lignée de Björn Sigurdsson, qui a vu toute sa famille se faire massacrer par Ulfenrir III Ragnarsson et qui a été forcée d’épouser le fils de ce dernier, Ragnar IV Ulfenrirsson, lui-même ayant tué sa mère sous ses yeux, reste fidèle à elle-même...
En jouant l’épouse modèle... Car elle ne craint qu’une chose, que Ragnar fasse du mal à l’un de ses enfants. Mais tout vole en éclat lorsqu’elle perd l’un de ses enfants. A vrai dire, elle a déjà perdu un enfant, Daghild une fille morte-née en 1067.
Mais l’enfant qu’elle perd et qui va tout changer, c’est Ulfenrir, son premier-né. En 1073, alors qu’il s’apprête à fêter ses 10 ans, il fait une mauvaise chute et meurt quelques heures après dans d’atroces souffrances.
La réaction de Ragnar ne fait qu’empirer la situation, ce dernier se disant simplement heureux d’avoir un autre fils pour assurer sa descendance.
Quelques mois plus tard, lors des festivités du printemps 1074, Ragnar s’écroule soudain, transpercé de part en part par une épée. Lorsqu’elle retire l’épée, sa femme Asta se contente d’aller s’asseoir à la place de Ragnar. Après un moment d’hésitation, les gens reprennent leur activité et la fête reprend son cours.

Le lendemain, le dernier fils de Ragnar et Asta est couronné. A l’âge de 1 an, Fenrir II Ragnarsson devient ainsi roi d’un royaume de taille respectable à l’extrême-nord du monde. Mais en attendant, c’est sa mère, la Reine Asta, qui gère la régence jusqu’à ce que Fenrir ait l’âge de régner.
En 1086 Asta arrange le mariage de Fenrir avec Lagertha Gudmundöttir, la fille du plus riche marchand d’esclaves du Royaume. Fenrir, qui est secrètement amoureux de Lagertha depuis un bon moment déjà est aux anges. Leur idylle dure un peu plus de quatre ans. Mais en 1090 Lagertha, alors enceinte de leur deuxième enfant, meurt peu avant l’accouchement.
En 1088, Asta abandonne la régence et laisse les pleins pouvoirs à son fils de 15 ans.
Très vite il se montre extrêmement investit et passe son temps à parcourir le Välgtland pour tirer le moindre avantage de chaque pouce de terrain. En revanche il ne semble plus avoir aucun attrait pour la gent féminine, se contentant de pleurer sa femme et de chérir son fils.

Le Roi Fenrir II va se montrer prudent, un peu trop même. Quelques missions de reconnaissance sont effectuées, mais aucun véritable raid, et ce pendant près de 30 ans.
Lorsque Fenrir II Ragnarsson décède en 1119, il laisse un Royaume du Välgtland très étendu et très bien organisé. Et ce royaume, il le laisse à son fils de 35 ans, Ragnar, qui se retrouve couronné Ragnar V Fenrirsson.